7 août 2024

Hommage à Charlie

 Notre chat Charlie est parti.

Il mérite une note, il était celui de nos chats qui ressemblait le plus au Chat qui n'aimait pas les Croquettes, même si jusqu'à la fin de sa vie, les croquettes, il les adorait.

ATTENTION ce n'est pas un texte très marrant.


C'est en 2010 que nous avons été le chercher au refuge SPA. Devant la cage des chats, Philippe a dit "celui-là". Il a désigné un chat typé chartreux, planqué dans un coin. L'employé qui nous avait accueilli a essayé pendant 10 minutes de l'attraper, nous demandant pour finir si on en voulait pas un autre. Nous avons demandé si nous pouvions essayer nous-mêmes de le prendre et malgré le fait que normalement, les visiteurs n'ont pas le droit d'entrer dans la cage, exceptionnellement, il nous l'a permis.

Dès que j'ai mis la main sur le chat, il s'est complètement ramolli. Je l'ai porté comme une crevette flasque. Il perdait ses poils par touffes et était à la SPA depuis au moins un mois.

Nommé Spirit, il est devenu Inox. Puis, comme il était très très peureux et se cachait dans les endroits les plus exigus et inattendus (genre derrière la pompe de mon aquarium, un espace de 10x20cm), nous l'avons baptisé Charlie. 

Il fallait qu'il s'habitue à son nouveau foyer et nous l'avons gardé à l'intérieur de la maison (située à l'époque au milieu des champs et des forêts). Après une semaine, il a réussi à s'échapper. La SPA nous a prêté une trappe et nous l'avons récupéré en l'appâtant avec des croquettes, mais il s'est échappé à nouveau. Cette fois, il est resté introuvable jusqu'à ce qu'une dame nous contacte pour dire qu'elle avait trouvé son collier à environ 2 km de chez nous. Là on s'est dit que ma foi, il ne voulait pas rester chez nous et qu'il fallait l'accepter. Nous avons donc été chercher une chatonne à Russy, mais elle était encore trop petite pour quitter sa mère et nous sommes revenus sans elle. 

Devant notre porte attendait Charlie.


Depuis son arrivée du refuge, Charlie a été malade pendant presque un mois . Diarrhée. Je nettoyais derrière lui. Nous avons été voir le vétérinaire du refuge, puis notre vétérinaire habituel. Ils ne trouvaient pas le problème. Un jour que Charlie était sur notre lit (il avait moins peur quand nous étions à sa hauteur), j'ai posé ma main sur son ventre et je lui ai dit que ça ne pouvait pas continuer comme ça. Le lendemain, il n'avait plus de diarrhée. 

Mais il a toujours été souffreteux et marchait le dos courbé. Philippe l'appelait le dinosaure.

Seccotine est venue deux semaines après et je pense qu'elle a beaucoup aidé Charlie. Nous n'oublierons jamais la fois que Charlie est venu avec une souris et qu'elle la lui a volée pour courir à toute vitesse autour de la maison avec. Charlie, flegmatique, est reparti chasser. Ils jouaient ensemble à se poursuivre, mais n'ont jamais été des chats proches.


Pour essayer de l'aider avec son dos, j'ai été voir une ostéopathe pour chats. Je l'ai posé sur la table de massage et l'ostéopathe a dit : "j'aimerais le voir marcher". Mais il s'est recroquevillé, terrifié. Elle a quand même contrôlé un peu tout et a conclu qu'il n'avait pas vraiment de souci ou de douleurs, juste qu'il avait cette position. 



Pendant les 14 années que nous l'avons eu, il n'a jamais été possible de l'approcher quand on le croisait à l'extérieur de la maison. Il venait se coucher parfois avec Philippe sur le canapé, ou avec nous sur le lit, et alors il ronronnait et adorait nos caresses à en baver de bonheur. Un vrai niagara.

Les parents de Philippe sont venus plusieurs fois garder nos chats quand nous partions quelques jours. Pour eux il était le "seigneur et maître". Ils se pétrifiaient quand il venait manger et ne respiraient que quand il était reparti. Charlie était discret mais savait exactement ce qu'il voulait : la paix.

Quand on avait des invités, il disparaissait et ne revenait que quand les voitures avaient disparu. D'ailleurs, s'il faisait une apparition, nos amis étaient ravis d'avoir vu ce chat-mystère.

Il était visiblement tiraillé entre le fait de nous faire confiance et sa peur profonde.

Philippe était plus proche de lui. 


Ces dernières années, il s'amaigrissait de plus en plus. Verdict du vétérinaire : une hyperthyroïdie. Il y avait des médicaments, mais impossible de les lui donner. Pendant un ou deux jours oui, mais ensuite il aurait été encore plus difficile à approcher. Et évidemment, impossible l'emmener chercher régulièrement une piqûre chez le vétérinaire, il avait failli faire une crise cardiaque lors de la dernière visite. Une seconde complication était la suivante : en plus d'affaiblir les organes, une hyperthyroïdie donne une grande soif. Si on la soignait, un problème de reins pouvait survenir parce que le fait qu'il buvait beaucoup soulageait son éventuel problème rénal. Et c'est connu, les problèmes de reins sont très très douloureux. Alors que là, il devenait de plus en plus maigre et risquait d'avoir à la longue un problème cardiaque. On devait faire le choix du moins pire.

Nous nous sommes résolus à ne pas le soigner. Nous lui avons par contre acheté des croquettes spéciales (mangées donc également par nos deux autres chats) et de la pâtée spéciale que nous lui donnions dès qu'il passait à la cuisine et consentait à en manger.


Et en fait, il mangeait bien, mais continuait à maigrir. On ne s'en rendait compte que quand on le caressait. Un sac d'os sous un poil doux et épais. Cela a duré plus d'un an et on savait qu'il était en sursis.

Est venu le mardi où nos trois chats devaient être vaccinés. Philippe l'avait enfermé à la cuisine dès le soir d'avant et Charlie paniquait déjà. J'ai hésité un instant à le prendre. Fallait-il vraiment lui infliger le vaccin ? J'ai regretté de l'avoir emmené chez le vétérinaire, mais finalement après réflexion en fait non*.

Quand la vétérinaire l'a sorti de sa caisse de transport, il faisait une grosse crise cardiaque et avait un souffle haletant. Il ne me voyait plus, les pupilles complètement dilatées. J'ai expliqué la situation à la vétérinaire et elle lui a fait une piqûre pour qu'il respire mieux (il faisait un oedème pulmonaire). Je suis repartie sans lui, lui laissant le temps de récupérer un peu au cabinet. Mais j'ai dit à la vétérinaire que je voulais qu'il meure à la maison. Nous avons été le chercher une heure plus tard. Il respirait très difficilement, langue dehors. Il s'est couché dans un coin frais du salon. Nous venions régulièrement le voir, lui parler. Quand nous lui donnions une caresse, il se mettait à ronronner. En début d'après-midi, il a respiré mieux grâce à la piqûre. Il a bu un peu. Et dormi. Nous avons continué à le veiller. Avant de me coucher, je l'ai nettoyé et j'ai nettoyé où il s'était couché. Il était incontinent, mais avait l'air de s'en ficher. Je suis montée me coucher en disant à Philippe que Charlie était en train de s'éteindre. 

Et effectivement, au matin, il était mort.

Il est enterré au pied de notre cognassier. On a eu la chance de connaître ce chat étrange. Un chat qui a décidé de rester avec nous, même quand nous avons déménagé. Un chat qui vivait sa vie de manière extrêmement indépendante, clairement traumatisé et qui pouvait être affamé de câlins.

Pour toujours dans nos coeurs.


O.


*L'expérience de la mort d'un proche est toujours désespérante. On cherche ce qu'on aurait pu faire, ce qu'on n'aurait pas dû faire. On culpabilise. On se console comme on peut. Charlie était au bout de sa vie, il aurait pu faire la crise cardiaque n'importe quand. Un jour, une semaine plus tard... Comme c'est arrivé chez la vétérinaire, elle a pu lui donner une piqûre pour calmer son coeur et pour qu'il respire mieux. Il s'est éteint doucement. Et au moins nous avons pu être avec lui jusqu'à la fin. Ma chatte Domino a disparu quand elle avait 16 ans et nous n'avons jamais su ce qui lui était arrivé.


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